Un Réseau national des gardiens autochtones

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INITIATIVE DE LEADERSHIP AUTOCHTONE 

Les gardiens autochtones : une version moderne d’une longue tradition de conservation du territoire. 

Dans l'ensemble du pays, une trentaine d’équipes de gardiens autochtones œuvrent à la protection et à la gestion de leurs territoires. Ils surveillent la faune, patrouillent dans les aires protégées et luttent contre les répercussions des changements climatiques. Ce faisant, ils honorent leurs traditions culturelles et forment la prochaine génération de leaders. 

Ce modèle a fait ses preuves : il donne des résultats et entraîne des avantages sociaux et environnementaux importants. Mais nous pouvons accomplir beaucoup plus encore. 

Un financement fédéral en soutien aux programmes des gardiens autochtones permettra de réaliser leur plein potentiel partout au Canada. De plus, il aidera à renouveler la relation de nation à nation et entre les Inuits et la Couronne. Cette nouvelle approche suscitera au sein des communautés de profonds changements fondés sur la fierté culturelle, les connaissances spécialisées et l’affirmation de la nationalité autochtone. 

L'Initiative de leadership autochtone a soumis une demande de financement au gouvernement fédéral pour créer un Réseau national des gardiens autochtones qui permettra d'étendre la portée des programmes des gardiens autochtones. 

Grâce au financement de ce réseau, le gouvernement atteindra plusieurs objectifs contenus dans le Discours du Trône de 2015 – notamment au chapitre de la réconciliation et de ses engagements internationaux en matière de changements climatiques. Il aidera aussi les programmes des gardiens à réaliser leur plein potentiel, au bénéfice des communautés et du pays dans son ensemble.

La création du Réseau 

Le Réseau national des gardiens autochtones proposé : 

  • fera profiter toutes les régions du Canada des retombées positives des programmes des gardiens autochtones existants;

  • prendra graduellement de l’ampleur selon l’intérêt exprimé par les communautés et leur niveau de préparation. Le Réseau pourrait engendrer jusqu’à 200 nouveaux programmes des gardiens en cinq ans;

  • offrira des emplois et de la formation aux gardiens afin qu’ils puissent travailler sur le territoire et au sein des communautés tout en soutenant la prise de décision se rapportant au territoire;

  • fournira un financement de base aux programmes des gardiens, ce qui éliminera l’incertitude liée au financement à la pièce et permettra d’obtenir d’autres fonds;

  • créera un réseau dirigé par les Autochtones en vue d’encourager le partage de connaissances et l'apprentissage au bénéfice des programmes des gardiens dans toute la nation.  

Étendre un modèle éprouvé

Une trentaine de programmes des gardiens ont déjà produit des retombées positives importantes dans les communautés qu’ils desservent. Le plus ancien programme d'intendance a vu le jour en 1973 à Haida Gwaii avant d’être officialisé au début des années 1980. La nation innue compte quant à elle un programme des gardiens depuis 1993. Il englobe aujourd’hui l’ensemble des programmes environnementaux de la nation innue, y compris l’exploitation forestière et minière, les pêches et la gestion de la faune. 

Les programmes d’intendance autochtone ont déjà fait leurs preuves. L’Australie a investi 618 millions de dollars (AUD) sur 10 ans dans le programme « Working on Country ». Des chercheurs ont démontré que chaque dollar investi dans ce programme génère 3 $ sous forme d’avantages sociaux, économiques et culturels. À l’heure actuelle, l’Australie compte 109 programmes des rangers autochtones qui assurent la gestion des terres et des eaux. Les études démontrent que le programme « Working on the Country » crée des emplois, réduit les prestations d’aide sociale, fait reculer la criminalité et la violence faite aux femmes en plus d’améliorer la santé de la population. 

Une étude de cas à paraître portant sur deux programmes des gardiens autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest, au Canada, conclut que pour chaque dollar investi, ces programmes ont déjà généré environ 2,50 $ sous forme d’avantages sociaux, économiques, culturels et environnementaux. Selon les chercheurs, le soutien apporté par un réseau national permettrait à la valeur de chaque dollar investi de générer jusqu’à 3,70 $.  

Soutenir la réconciliation

Nous sommes à un moment charnière de l'histoire du Canada. Le pays est confronté aux séquelles de la colonisation, comme indiqué dans les conclusions et recommandations de la Commission de vérité et réconciliation. Il est temps de mettre en place un modèle positif, tourné vers l'avenir, qui honore les droits et les responsabilités des Autochtones à l'égard de la terre. 

Les programmes des gardiens illustrent concrètement la réconciliation : ce sont les peuples autochtones qui assurent la gestion des terres autochtones. 

La Commission de vérité et réconciliation a recommandé de combler les écarts en matière d’éducation et d’emploi entre les Autochtones et les non-Autochtones au Canada. Les programmes des gardiens permettent de mettre en oeuvre cette recommandation – et plusieurs autres de la Commission de vérité et réconciliation. Dans le cadre de ces programmes, une formation spécialisée et des emplois au service des communautés sont également offerts. 

Outiller la jeunesse 

Lorsqu’on demande aux jeunes Autochtones de nommer une source d’inspiration pour eux, ils répondent : passer du temps sur le territoire. Les programmes des gardiens leur offrent cette possibilité, en plus de leur procurer un but et de développer chez eux un sens du leadership. Devenir gardien renforce le sentiment de fierté des jeunes envers leur culture. Depuis trop longtemps, les lois et les politiques gouvernementales ont tenté de dépouiller les peuples autochtones, en particulier les jeunes, de leur identité culturelle – entraînant des souffrances et un désespoir qui perdurent depuis des générations. 

Les programmes des gardiens offrent des emplois intéressants qui valorisent et permettent d’honorer les traditions culturelles en plus de rétablir le rôle des gardiens du savoir auprès des jeunes générations. Voilà de quoi faire rêver la jeunesse autochtone. Les jeunes s’instruisent grâce à l’apport combiné du savoir traditionnel et de la science occidentale. Ils acquièrent les outils qui leur permettront non seulement de devenir les gardiens d’aujourd'hui, mais aussi les enseignants, les avocats, les scientifiques et les décideurs de demain. 

Participer aux décisions en matière d’utilisation du territoire 

Les gardiens participent pleinement aux décisions concernant l’utilisation du territoire et de tout ce qui en dépend. Ils assurent ce lien essentiel entre les décisions des dirigeants et la réalité sur le terrain et dans les communautés. Les gardiens affectent des ressources et offrent des espaces de discussions axés sur les responsabilités culturelles des Autochtones envers le territoire et sur la façon dont les peuples autochtones peuvent affirmer leur nationalité autochtone en rapport avec le territoire. 

Ils recueillent aussi des données pour aider les communautés à déterminer où établir des aires protégées, où construire des infrastructures et où mener des projets d’exploitation du territoire. Les gardiens favorisent les relations harmonieuses entre les communautés et les entreprises, notamment en précisant le moment opportun pour réaliser des projets d’exploitation des ressources et les critères à respecter. 

Lorsque des gardiens sont présents sur le territoire, les communautés se montrent plus favorables aux projets d'exploitation des ressources. Par exemple, certaines communautés innues et inuites se sont d’abord opposées au projet de la mine de la baie Voisey’s. Mais lorsque des gardiens de l’environnement de la nation innue ont accepté d’en assurer la surveillance, le projet a gagné en acceptabilité sociale auprès des nations innues. 

Un Réseau national des gardiens autochtones permettra de renforcer la capacité au sein des programmes existants pour qu’ils puissent déployer leur plein potentiel et qu’un plus grand nombre de communautés élaborent leur propre plan d’aménagement du territoire et participent activement aux décisions concernant les projets d'exploitation des ressources.

Protéger notre environnement commun 

Si les programmes des gardiens autochtones renforcent les communautés au niveau local, ils participent également plus largement aux efforts de conservation des systèmes naturels dont dépendent tous les organismes vivants.

De nombreux programmes des gardiens interviennent dans la forêt boréale – un écosystème d’importance mondiale qui comprend une forêt intacte dont la superficie est plus grande que l’Amazonie et qui absorbe près de deux fois plus de carbone que les forêts tropicales. Le travail des gardiens contribue à conserver ces richesses pour nous tous : 

  • La biodiversité : les gardiens surveillent les populations de caribou et d'autres espèces menacées, gèrent les espèces envahissantes et protègent les sites de nidification de la forêt boréale où des milliards d’oiseaux migrateurs viennent se reproduire.

  • Des forêts en santé : les gardiens jouent un rôle essentiel dans l’établissement et la gestion des aires protégées, y compris les parcs, dans l’ensemble du pays.

  • Un climat plus stable : en préservant la santé des forêts et des zones humides, les gardiens contribuent à empêcher que d'énormes réserves de carbone ne soient libérées dans l'atmosphère. Ils surveillent aussi les effets des changements climatiques et aident à en atténuer les effets. 

Le rôle des gardiens 

 Les gardiens exercent divers rôles dans leurs communautés. Ils : 

  • sont des « yeux et les oreilles » sur le territoire, dans les salles de réunion et au sein des communautés;

  • élaborent des plans d’aménagement du territoire et d’autres plans de gestion des ressources, y compris l’exploitation forestière;

  • patrouillent dans les aires protégées et expliquent le contexte culturel autochtone;

  • surveillent la faune – qu’il s’agisse de troupeaux de caribous, de montaisons de saumons ou de l’ADN des grizzlys – et veillent à l’application de la loi;

  • surveillent les projets d’exploitation des ressources tels que les projets d’exploitation minière, d’exploitation forestière ainsi que de développement énergétique;

  • renseignent les visiteurs à propos des valeurs culturelles et d’autres activités respectueuses du territoire;

  • luttent contre les effets des changements climatiques, notamment les incendies de forêt majeurs et les infestations d’insectes;

  • rétablissent les forêts, les cours d'eau et d’autres portions du territoire.

Les gardiens en action 

On compte une trentaine de programmes des gardiens autochtones actifs au Canada, y compris : 

Haida Gwaii : Le long des côtes de la Colombie-Britannique, les gardiens côtiers de Haida Gwaii veillent sur les terres et les eaux de leur nation selon leurs lois traditionnelles. Ils sont actifs dans le secteur des pêches, de la foresterie et des parcs et gèrent des sites culturels d’importance tout en partageant leur savoir avec les visiteurs. Leur mode de fonctionnement a inspiré la mise sur pied du Réseau des gardiens côtiers, qui relie huit nations autochtones côtières qui effectuent un travail semblable. 

Le programme innu : Au Labrador, le programme des gardiens de l’environnement de la Nation innue emploie 15 gardiens responsables de gérer les pêches, le caribou et les activités forestières et de surveiller les projets de développement d’hydroélectricité et d'exploitation minière. Le programme a joué un rôle essentiel dans le renforcement des capacités et du leadership au sein de la nation innue, leur permettant de négocier l'accord de principe Tshash-Petapen (l'aube d'un nouveau jour) avec la Couronne, de diriger les efforts d’aménagement forrestier sur une superficie de 71 000 km2 et de faire progresser les initiatives de conservation, notamment la création de la réserve de parc national Akamiuapishku - KakKasuak - Monts Mealy. 

Lutsel K’e : La communauté dénée de Lutsel K'e, dans les Territoires du Nord-Ouest, a lancé en 2008 le projet Ni Hat'ni Dene (surveiller le territoire). Ces gardiens aident à préserver un territoire de plusieurs milliers de kilomètres carrés près du Grand lac des Esclaves, où la communauté cogérera la réserve candidate de parc national Thaidene Nene. Les gardiens assureront la gestion des sites culturels, veilleront à préserver la beauté naturelle de Thaidene Nene et proposeront des visites d'interprétation. Le programme aidera la communauté et Parcs Canada à établir un secteur touristique durable pour la région, ce qui créera des emplois et des retombées pour la communauté et pour l’ensemble des Territoires du Nord-Ouest.

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Résolution de l’Assemblée des Premières nations : Appui à un programme national des gardiens